mardi 17 janvier 2012

La Saga des Yata toujours au top, malgré la disparition du fondateur Ali et la mort d’un des Dupont

À : , Convergences

Objet : Quand Fahd YATA, ex. ou crypto-stalinien, s'érige en en défenseur d'une monarchie corrompue à partir de l'argument que le fric permet de tout acheter. Histoire d'une caravane et d'un chien de garde enragé


La Saga des Yata toujours au top, malgré la disparition du fondateur Ali et la mort d’un des Dupont


La mémoire des communistes marocains makhzénisés reste soigneusement entretenue par le seul survivant de la troïka, l’autre Dupont, l’ineffable Fahd YATA, plumitif patenté de la couronne.

Chez les Yata, la question de l’argent n’a jamais été saisie sur le terrain de la science, dite économique, comme le fait Marx des Manuscrits de 44 au Capital.

Comprendre, dans le fond, le secret de l’emprise terrible de cette altérité sur le corps social, car il y allait du sort même de l’émancipation de l’homme. Non, chez les Yata foin de matérialisme historique ou dialectique, on est avec l’argent dans une lecture psychanalytique.

L’argent n’a pas fait l’objet d’un désir infantile”, selon la formule lapidaire de Freud. En faisant court et pour aller au cœur de l’argumentaire de Fahd YATA, et à sa décharge, je dirais que c’est justement parce que l’argent n’a pas été primitivement ni fondamentalement désiré qu’il peut être “aimé”. C’est aussi parce que l’argent n’est pas objet de désir et de savoir qu’il a vocation à régler le transit du pouvoir.

Je laisse la liberté à Fahd YATA de voir avec son analyste le lien à la fois ambigu et déterminant, de l’argent et de l’inconscient. Ces réflexions préliminaires, me semblaient inévitables, pour souligner pourquoi et comment la quasi totalité du papier de Fahd YATA repose sur la problématique de l’argent; pour du fric, rien que du fric, comme il l’écrit si bien lui-même.

Encore un mot, pour comprendre l’approche “théorique” de Fahd YATA; il faut en effet reconnaître au clan Yata un sens de l’anticipation historique assez considérable pour être souligné avec force ici. Ali, le fondateur a fait plus fort et plus tôt que Gorbatchev avec la Perestroïka et la Glasnost.

Si, en URSS, il a fallu attendre la fin des années 80 pour passer directement du totalitarisme stalinien au règne de la maffia avec Boris Eltsine et Vladimir Poutine, au Maroc, avec Ali Yata, les “communistes” ont réussi une brillante transition d’un marxisme islamo-tropical à un neo-marxisme monarchiste, dès les années 70.

Ali YATA et les siens, se sont trouvés un puissant allié en la personne de Hassan II. Ce dernier, il est vrai, a dépensé sans compter pour Yata: le financement total de son journal Al Bayane en deux langues, celui de l’appareil et toute l’intendance du clan d’Ali. En échange, Ali Yata le communiste, est devenu le champion du chauvinisme national, ambassadeur itinérant dans tous les pays de l’Est pour défendre et expliquer la marocanité du Sahara Occidental, peu avant il s’était débarrassé de tous ses gauchistes, les donnant parfois directement aux flics du Roi.

Sa soumission à Hassan II ira jusqu’à suggérer au roi de bannir Abraham Serfaty, assurant de manière véhémente à Hassan II (devant témoin) que le juif révolutionnaire était brésilien.

Pour le reste et tout le monde connaît la musique, le PPS et Ali Yata ont toujours souffert d’une amnésie totale. Pour eux les années de plomb, Tazmamart , Kalaat Mgouna, au mieux c’était de la fiction d’idéologues des droits de l’homme, au pire de la propagande impérialiste.

Lire aujourd’hui sous la plume de Fahd YATA “que SM le Roi provoque la douloureuse catharsis sur les années de plomb” après avoir institué par dahir l’IER, relève de la forfaiture.

Ecouter le même Fahd, crier au scandale parce qu’un hebdomadaire marocain évoque la liste civile de M6, autrement dit, dévoile à l’opinion comment la maffia du Palais dépouille les richesses de tout un peuple, c’est un crime de lèse majesté.

La règle d’or dans la maffia, c’est le silence. Puisque Tel Quel a violé cette loi, que peut écrire Fahd Yata, sinon son tas d’immondices sur le fric, la concurrence déloyale. Pire encore, tout le bavardage de notre preux pisse-copie repose sur une base axiomatique étalée en toute innocence “la liste civile et le Budget royal sont des éléments constitutifs du cadre institutionnel et constitutionnel légal du Royaume du Maroc. Ses responsables savent pertinemment que les revenus royaux n’ont rien à voir avec les dotations budgétaires accordées au Chef de l’Etat, lequel bénéficie de ce droit comme tous ses homologues de par le monde, qu’ils soient monarques ou présidents !”

Ben voyons! Qui oserait mettre en doute la parfaite symétrie entre M6, le Roi Juan Carlos ou la reine Elisabeth!

En vous moquant, avec ce mépris qu’on vous sait, des petits revendeurs à la criée “qui font l’article à certains ronds points névralgiques de Casablanca en disant aux automobilistes”: "Achètes Tel Quel, y a un dossier sur le salaire du Roi, il gagne plus que tous les Marocains réunis"; vous écrivez, pauvre inconscient, peut-être la seule autre “vérité” de votre article.


Le but visé par Fahd Yata


L’irrévérence fera sans doute rire le premier intéressé, le venin, tout le venin de Fahd Yata est contenu dans sa formule : Le syndrome d’Iznogoud.

Le fric, Tel Quel, Le Monde, tout cela était du pipeau. Une introduction laborieuse pour la mise à mort fantasmée, l’estocade finale contre le Prince Moulay Hicham.

Je ne résiste pas au plaisir de vous citer intégralement pour qu’on vous comprenne mieux, Monsieur le Valet du Roi, “Tel Quel, enfin, qui sert complaisamment la soupe, à la faveur d’un entretien faussement enjoué, mêlant arabe dialectal et interjections populaires, à un exilé célèbre, aussi imbu de sa personne que méprisant pour tous ceux qui pensent différemment de lui, lesquels, pour certains du moins, n’hésitèrent pas à dire à " Monseigneur " qu’ils percevaient sa démarche critique comme l’expression avérée du syndrome d’Iznogoud.”

Nul doute, qu’à l’époque des soviets avec l’aide des copains de papa, vous auriez jeté ce Prince, même rouge, au Goulag!

Vous n’aimez pas Moulay Hicham et vous avez mille raison de le haïr. Vous qui êtes le spécialiste des équations du premier degré vous avez très vite compris, qu’il n’y a pas équivalence entre M6 et Moulay Hicham. Vous mesurez la différence abyssale entre un Roi qui hérite d’une souveraineté toute makhzénienne, qui flotte dans un habit qui n’est plus taillé à sa mesure, celui d’Amir el Mouminine (Commandeur des croyants) et un prince neo-légitimiste qui n’a d’autre volonté que celle d’arracher son pays à tous les archaïsmes.

Vous avez peur et on vous comprend! Peur de possibles Etats-généraux, peur d’une Constituante, peur de la démocratie et de l’émancipation de 30 millions de sujets. Et c’est cette trouille qui vous taraude, qui vous fait écrire maladroitement tout et n’importe quoi, pourvu que “Monseigneur” ce gêneur se taise, rentre dans le rang, se fasse phagocyter par ce makhzen avec lequel, vous et vos semblables, vous faites fusion.

Il vous faut déchanter, pauvre Fahd! Personne ne vend ou ne brade l’image du roi. Aux deux questions de votre confrère de Tel Quel, vous avez lu comme moi, les réponses éclairantes et cinglantes de Moulay Hicham. Je vous les retranscris pour mémoire:


Une monarchie peut-elle encore être "sacrée", au XXIème siècle ?

La démocratie et la sacralité ne sont pas conciliables. Voilà toute la problématique du système politique marocain. C’est une question qui nous touche tous.


Le système serait en péril si un jour, il ne reposait plus sur le sacré ?

Le système, oui. La question est maintenant de dissocier la monarchie du système califal, ou de faire évoluer ce dernier. Réformer la monarchie est le seul moyen de la pérenniser.”

Comme des milliers d’intellectuels marocains et arabes, je me tiens aux côtés de Moulay Hicham. Il symbolise tout le Maroc que nous voulons et qui n’est pas assurément semblable au vôtre.

Ahmed BENANI

Politologue

Lausanne, le 3 janvier 2005

PS: pour souligner tout le mal que je souhaite à Moulay Hicham, je vous renvoie à ma lettre à l’occasion de son 40e anniversaire




MAROC

LA NOUVELLE TRIBUNE

Nº 432 - 30/12/2005

Par Fahd YATA

Actualité [ 30/12/2005 ]

Pour du fric, rien que du fric

Quand Tel Quel vend et brade l’image du Roi

Croyez-vous aux coïncidences, au hasard, notamment en journalisme ? Croyez-vous qu’il est honnête d’utiliser la liberté de la presse sous prétexte de lever de prétendus tabous, alors qu’il s’agit en réalité d’engranger le maximum de fric en utilisant des procédés très peu éthiques


Lorsqu’un hebdomadaire s’attaque à la liste civile du chef de l’Etat, publie une interview du "Prince citoyen", mène une campagne agressive pour réaliser un chiffre d’affaires conséquent en insertions publicitaires pour le dernier numéro de l’année et clôture son édition par la présentation de ses tirages et ventes, doit-on croire qu’il s’agit-là d’une simple et anodine démarche d’un titre dérangeant et iconoclaste ?

Rien n’est moins sûr, surtout quand on prend la peine de gratter ce vernis superficiel qui recouvre si finement (trop finement sans doute) la démarche professionnelle de l’hebdomadaire Tel Quel, (qui n’a jamais autant mérité son nom) ! Car il nous apparaît tel qu’il est cet hebdo qui s’amuse à enfoncer les portes ouvertes et qui, s’appuyant sur l’ignorance crasse d’une partie de ses lecteurs, lesquels, bien sûr, ne connaissent pratiquement rien du contenu classique d’une Loi de Finances, se paye (dans les deux sens du mot) la personne du Roi, en étalant sur ses colonnes les détails de la liste civile du Chef de l’Etat et le Budget de la Maison royale.

Une démarche journalistique, d’investigation, d’information que celle de Tel Quel ? Que nenni ! Une démarche mercantile, pour faire du fric, et rien que du fric, comme le prouve la campagne agressive à laquelle s’est livré ce titre tout au long de la semaine dernière en direction des annonceurs, en proposant des ristournes pour des insertions dans le numéro double de fin d’année. Nos pourfendeurs des abus de l’appareil sécuritaire, nos adeptes d’une attitude " soft " envers les islamistes, nos donneurs de leçons sur tout et sur rien, nos concombres masqués de cette presse qui fait la joie des élites (dé)branchées de la bourgeoisie analphabète démentiront-ils qu’ils ont assailli de coups de téléphone et de courrier nombre d’entreprises locales et étrangères en proposant " des réductions majeures, jusqu’à 75 % du tarif, pour une insertion dans un numéro spécial sur le salaire du Roi " ?


Le syndrome d’Iznogoud


Démarche déontologique que celle-ci qui conduit à présenter ce qui est public et officiel comme des " documents inédits ", alors qu’on double le tirage et qu’on insiste auprès du distributeur pour une présentation " soignée " du numéro tout au long de la quinzaine à venir ? Au point où certains revendeurs à la criée font l’article à certains ronds points névralgiques de Casablanca en disant aux automobilistes: "Achètes Tel Quel, y a un dossier sur la salaire du Roi, il gagne plus que tous les Marocains réunis".

Un numéro double pour aller passer de joyeuses fêtes de fin d’année, celles-là même que le triste Raïssouni condamne, tandis que Tel Quel se plait à défendre les partisans de l’intolérance. Tel Quel qui prétend qu’on torture les islamistes à Témara et qui, sans pudeur, insère plusieurs pages de publicité pour boissons alcoolisées, de Johnnie Walker à la " Cuvée Première du Président " en passant par " Eclipse de Sahari, un vin d’exception "…

Tel Quel qui précise que "les chiffres ne sont pas sacrés" et qui nous prouve, dans le même temps, que l’argent n’a pas d’odeur, ni de goût…

Tel Quel, enfin, qui sert complaisamment la soupe, à la faveur d’un entretien faussement enjoué, mêlant arabe dialectal et interjections populaires, à un exilé célèbre, aussi imbu de sa personne que méprisant pour tous ceux qui pensent différemment de lui, lesquels, pour certains du moins, n’hésitèrent pas à dire à " Monseigneur " qu’ils percevaient sa démarche critique comme l’expression avérée du syndrome d’Iznogoud.

Après avoir quasiment accusé le Maroc d’être à l’origine de l’assassinat de Hicham Mandari (qualifié aujourd’hui de " crime presque parfait "), publié les " bonnes feuilles " d’Ignace Dalle salissant la mémoire de deux Souverains, l’hebdomadaire en question (au fait, à qui appartient-il vraiment, ce titre qui prône la transparence et qui se fait très discret sur son actionnariat depuis l’été dernier ?), fustige dans un encadré tous ceux qui ont pu bénéficier de "dotations royales " et autres subventions.

Tel Quel n’a-t-il pas reçu, il y a quelques mois, les largesses d’une institution étatique sous couvert de la réalisation d’un numéro spécial sur le tourisme au Maroc ?

N’était-elle pas bienvenue cette " aide " d’un office alors que les actionnaires de l’époque rechignaient devant la nécessité de procéder à une énième augmentation de capital pour renflouer les caisses de l’hebdo ?

Oublié ce temps-là depuis l’arrivée d’un actionnaire généreux et ingénieux, un spécialiste de la presse hexagonale, une " perle " rare dans le Landerneau médiatique marocain…

Parce qu’au Maroc existe effectivement cette liberté de la presse pour laquelle les "blancs becs " n’ont jamais rien subi, parce qu’il ne saurait être question de laisser le fric et la diffamation emporter les valeurs fondatrices d’une presse libre et responsable, quelques vérités seront ici énoncées.

Tel Quel, sans honte ni pudeur, a monté une lamentable opération de marketing en exploitant la personne du Roi, son statut et les droits qui y sont afférents. En proposant des insertions au rabais (repoussées d’ailleurs par plusieurs annonceurs, étrangers notamment, qui n’ont pas voulu associer leur image ou leur nom à cette opération), en prenant en otage d’autres institutionnels qui se trouvent piégés par des ordres d’insertion donnés bien avant la "confection" de ce numéro, l’hebdomadaire Tel Quel trompe et triche, parce qu’il sait, tout comme nous, que la liste civile et le Budget royal sont des éléments constitutifs du cadre institutionnel et constitutionnel légal du Royaume du Maroc. Ses responsables savent pertinemment que les revenus royaux n’ont rien à voir avec les dotations budgétaires accordées au Chef de l’Etat, lequel bénéficie de ce droit comme tous ses homologues de par le monde, qu’ils soient monarques ou présidents !


Money !


Mais, parce qu’il faut vendre espaces et exemplaires, parce que le lectorat local est, y compris dans les sphères "éclairées ", connu pour son manque de culture et de connaissances, on a délibérément choisi de brader la personne du Souverain, en parlant fric pour faire du fric! C’est à cela que sert cette liberté de la presse chère aux rédacteurs de Tel Quel…

Et dans le même temps, comme le prouve la complaisance du quotidien parisien Le Monde, toujours prompt à s’associer à toute démarche anti-monarchique, on se fait complice d’une opération délibérée de sape et de dénigrement des actions les plus nobles et les plus courageuses de l’Etat. Car, comme le comprendront tous ceux qui ont quelque jugeote, au-delà du dossier à sensation sur " le salaire du Roi ", c’est l’entretien avec le Prince Moulay Hicham qui constitue en fait le cœur véritable de ce "numéro double".

En effet, sous le couvert d’une interview " sympa ", l’autoproclamé exilé se livre à une attaque en règle contre la récente initiative de l’IER destinée à donner au peuple marocain l’occasion de se réconcilier avec un passé aussi lourd que méconnu de la plupart de nos concitoyens.

Tandis que SM le Roi provoque la douloureuse catharsis sur les années de plomb, que Tazmamart et Dar El Mokri sont évoqués en direct à la télévision marocaine, Moulay Hicham et Tel Quel chipotent, ratiocinent, critiquent et proposent, tout simplement, de faire précéder la démarche de l’IER "d’élections fondatrices " au motif que " ces auditions ne sont pas une armature assez solide pour un processus de réconciliation complet ". Ni plus, ni moins !

C’est donc la destruction délibérée d’une action unique en son genre à l’échelle du monde arabe et de la communauté islamique que vise le Prince Moulay Hicham, accompagné des preux journalistes de Tel Quel. Parce que SM le Roi a voulu cet exercice aussi courageux que salutaire pour l’approfondissement de la démocratie et l’ancrage pérenne d’une véritable culture de respect des droits de l’Homme, parce que les victimes parlent enfin de leurs traumatismes, de leurs souffrances, un trio, composé d’un hebdo, d’une petite organisation gauchiste (l’AMDH) et d’un opposant avéré à la règle de la primogéniture, se constitue pour tenter de casser une courageuse dynamique totalement inconcevable, il y a à peine cinq ans.


Comme Bob et Al


Et Le Monde, bien évidemment, de prendre le train en marche, pour récupérer à Casablanca et Rabat les lecteurs qu’il a perdus à Paris, en faisant avec Tel Quel ce qu’il fit avec Le Journal avant que cet hebdomadaire ne rentre dans le rang, que ne quittent le navire ses distingués capitaines, partis " étudier " à Londres ou New York, et que se manifeste une nouvelle ligne éditoriale qui a fait perdre à ce titre sa raison d’être.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on ne craindra pas de prédire qu’une telle mésaventure arrivera tôt ou tard à d’autres, à ceux qui n’ont d’objectif que les maladroites tentatives de sape et de sabotage quand il s’agit à la fois de construire le pays, de développer ses infrastructures, de rehausser le niveau de vie général, de conforter la démocratie, d’accepter de revisiter dignement un passé qui ne sera plus omis ou ignoré.

Faire de l’information sur du vent n’a jamais duré très longtemps.

Vendre et brader l’image du Roi pour un si piètre résultat, Tel est pris Qui croyait prendre !


Fahd YATA


LA NOUVELLE TRIBUNE

Hebdomadaire marocain paraissant le jeudi - Directeur de la publication: Fahd Yata

320 BD Zerktouni, angle rue Bouardel - Casablanca - Maroc

00 212 22 20 00 30 (7 lignes groupées) 00 212 22 20 00 31 courrier@lanouvelletribune.com

De : BENANI AHMED

Répondre à : Maroc_citoyen@yahoogroups.com

Date : Sat, 01 Jan 2005 03:46:43 +0100

À : Maroc 21

Objet : [Maroc_citoyen] "D émocratie et sacralité sont inconciliables" la totalité des propos de My Hicham, le prince "en dissidence" malgré lui. Un bol d'oxygène dans un climat politique délétère (A.BENANI)


http://www.telquel-online.com/156/interrogatoire_156.shtml

TELQUEL



N° 156-157

Samedi 1 Janvier 2005




Par Driss Bennani


"Démocratie et sacralité sont inconciliables"


Antécédents

Moulay Hicham

Prince

1964. Naissance à Rabat

1981. Départ aux États-Unis pour études

1983. Décès de son père, le prince Moulay Abdallah

1995. Signe un article sur les régimes arabes dans Le Monde Diplomatique, rupture avec le Palais royal

1996. Observateur aux élections palestiniennes

2000. Un hélicoptère russe le dépose à Pristina (Kosovo)



Smyet bak ?

Le prince Moulay Abdallah.


N’âam sidi ! Smyet Mok ?


Lamia Riad El Solh.


Ce n’est pas dans les habitudes de la maison, mais smyet Ould âmmek ?

Wa dsara hadi ! Sa Majesté Mohammed VI.


Allah i barek f’aâmer sidi ! Nimirou d’la carte ?

Je n’en ai pas. Je n’ai jamais été la récupérer.


Vous avez quoi comme pièce d’identité, alors ?

Mon permis de conduire et mon passeport.


Nimirou d’lpasseport, donc ?

(De mémoire) 51 55 A.


Ok. Prince rouge, prince des lumières, prince démocrate… ces dénominations flattent-elles votre ego ou vos convictions ?

Ni l’un ni l'autre. Ce sont des dénominations simplistes, des raccourcis utilisés pour la reconnaissance ou la distinction. Quant à moi, je me considère comme un citoyen marocain.


Comme moi ?

(Après réflexion) Oui, comme vous.


Etes-vous vraiment interdit de palais ?

Oui, depuis 1995. J’y suis retourné entre 1997 et 1999 pour voir mon oncle dans le cadre de visites strictement privées, où il n’y avait que lui et moi. La dernière fois, j’y ai assisté aux funérailles de feu Sa Majesté Hassan II


A quand remonte votre dernier contact avec Mohammed VI ?

A Septembre 1999. Il a frappé à ma porte lors du baptême de ma fille en me disant : "tu ne m’invites pas, alors ?". J’ai répondu qu’on n’invite jamais le chef de famille, qu’il est toujours chez lui.


Et depuis, plus rien ?

Je ne l’ai plus jamais revu. Une délégation m’a rendu visite pour m’informer que j’étais, à nouveau, interdit d’accès au palais royal.


Vous dites avoir été victime de persécutions policières, jusqu’où cela est-il allé ?

Je dis que j’ai fait l’objet d’une gestion sécuritaire. Je ne suis pas une victime.


Le prince que vous êtes ne pouvait donc pas faire cesser tout cela ?

Ce n’est pas une question de personnes. Je n’ai pas été seul. D’autres groupes, dont des journalistes, ont connu cela aussi. Je me suis d’ailleurs toujours posé la question de savoir s’il s’agissait d’une décision politique ou d’une autonomisation de quelques lobbies.


Vous parlez d’autres personnes et de journalistes. Vous n’estimez pas qu’un prince a quand même droit à une "gestion" particulière ?

Peut-être, mais elle n’en sera alors que plus grave.


Vous accusez le général Laânigri d’être derrière cette cabale. Qu’est ce qui vous permet de l’affirmer ?

C’est du passé. J’ai dit ce que j’avais à dire. J’en reste là. Disons qu’en 3 ans, on a tous pris de la bouteille… (Sourire)


Pourquoi n’avez-vous pas réagi quand une partie de la presse marocaine vous insultait ?

Ça ne m’a pas choqué. J’ai vu des gens tirer sur mon père et mon oncle. Et j’ai traîné mes guêtres dans pas moins de 3 guerres civiles. Ces réflexes de courtisan ne m’impressionnent pas. Ce que j’en ai retenu, c’est un dysfonctionnement grave, qui aurait pu dégénérer La raison d’être du courtisan est de se prévaloir en flattant le prince. Ça, ça ne changera pas.


Vous reconnaissez-vous en tant que dissident de la monarchie marocaine ?

Si dissidence il y a, ce serait un état de fait qu’on aura créé. Quand j’ai commencé à me définir politiquement dans les années 90, il me semblait, comme à d’autres, que la monarchie faisait son aggiornamento. Cette institution n’étant pas monolithique, je me considérais être un élément de cette diversité. Encore récemment, cela a déchaîné des réactions très violentes. Je suis donc un dissident malgré moi.


Vous êtes un prince progressiste, revanchard ou joueur ?

Revanchard ? Non, je ne le suis pas. La revanche découle de la haine. Très tôt, j’ai appris que c’était le sentiment le plus fort chez les hommes. Qu’il faut le maîtriser, sinon il vous contrôle. Progressiste ? Oui, et je suis joueur à plus d’un égard.


Vous pensez à quoi ?

Au jeu, au Fun Game. C’est un trait de la famille. The game must go on.


Vous avez déjà fait jouer votre rang de prince ?

Si j’avais voulu le faire, j’aurais scotché mes fesses sur la chaise à côté de feu Sa Majesté Hassan II.


A gauche ou à droite ?

J’ai toujours été ailier gauche.


Vous avez dit que vos frère et sœur sont "parfaitement makhzénisés". C’est un tort ?

Je ne l’ai jamais dit.


Bien. Le sont-ils ?

Allez leur demander vous-même.


Depuis tout jeune, vous avez toujours fait votre vie ailleurs. Un prince ne peut-il pas avoir de carrière au Maroc ?

J’ai passé deux décades à essayer de concilier mes convictions et ma réalité. Je ne suis pas arrivé à faire grand-chose. Quand j’ai quitté le Maroc, et ce n’était pas un exil, je voulais prendre du large. J’ai réalisé que ma présence était contre-productive pour tout le monde. Qu’elle gênait le roi et la famille et qu’elle parasitait les vrais démocrates. La distance arrangeait donc tout le monde. Aujourd’hui, je me considère culturellement et identitairement Marocain. Mais ma vie est ailleurs.


C’est parce que vous ne vouliez pas ressembler au genre de prince qu’a été votre père aux côtés de Hassan II que vous êtes parti ?

L’expérience de mon père aux côtés de Hassan II m’a beaucoup appris. Mais les situations ne sont pas analogues. Moulay Abdallah était le compagnon de lutte de Hassan II. Le soldat inconnu, c’est d’ailleurs comme ça que j’appelle sa tombe, comme me l’a suggéré un chef d’État en fonction que je ne nommerai pas. Maintenant, les temps ont changé.


L’histoire a été injuste à l’égard de votre père ?

(Silence ému…) Ce n’est pas dans une interview qu’on peut développer un thème pareil.


Il paraît qu’après la mort de votre père, vous vous êtes autoproclamé chef de votre petite famille. C’est vrai ?

Non. Mais disons qu’à 19 ans, je me suis retrouvé dans des souliers beaucoup plus grands que les miens. À essayer, de manière honorable et satisfaisante, de remplir une partie des fonctions protocolaires de Moulay Abdallah aux côtés de son frère. A continuer d’être le réceptacle de beaucoup de monde pour qui mon père était un conduit vers Hassan II. Et finalement, à être le grand frère d’enfants en bas âge. J’ai fini par dire à mon oncle : "je préfère être votre troisième fils plutôt que votre frère". Je voulais vivre ma jeunesse. Plus tard, j’ai eu des remords de ne pas avoir été assez présent pour mon frère et ma sœur. J’ai rattrapé cela 15 ans après. C’est peut-être mon plus grand accomplissement.


Comment ça se passait, avec Hassan II ?

Ce fut un défi terrible que de vouloir vivre ma vie, en Amérique en plus, face à un oncle traditionnel et autoritaire, voulant ramener le neveu dans son giron, dans la pure tradition islamique. Résultat : des pressions énormes qui se sont déployées de manière contradictoire sur 15 ou 20 ans.


Votre séjour aux États-Unis est à l’origine de votre complexe de supériorité ?

Plutôt à l’origine de la confiance en moi-même et de mon self esteem qui peuvent effectivement mener à un complexe de supériorité. Heureusment qu’on m’a assez secoué pour me faire garder les pieds sur terre.


Hassan II est un personnage qui vous fascine ?

Un personnage qui m’a marqué. J’ai perdu mon père à l’âge de 18 ans, Hassan II a donc, de facto, été mon père pendant 16 ans. Cela veut dire que j’ai presque autant vécu sous Moulay Abdallah que sous Hassan II.


En avez-vous gardé des séquelles ? Par exemple, vous arrive-t-il d’être hassanien ?

J’ai politiquement ouvert les yeux avec Moulay Abdallah. Mais ma vraie politisation a été mûrie aux côtés de Hassan II. Une grande partie de ma personnalité s’est forgée parce que j’ai été autonome par rapport à lui. Cela n’a pas été facile.


Vous avez la réputation d’être un piètre businessman…

Je ne suis pas un golden boy, si c’est ce que vous voulez dire. Ça ne m’a jamais réussi. Comme pour beaucoup d’autres choses, je n’ai jamais vraiment pu me développer au Maroc. Mais je gagne bien ma vie à l’étranger.


Vous êtes riche ?

Ça reste relatif.


TelQuel réserve sa couverture cette semaine au salaire du roi. Et le vôtre ?

Certainement largement inférieur au sien. Mon salaire me permet de vivre décemment.


Seulement ?

Disons confortablement.


Vous percevez un salaire de l’État ?

Un jour, lors d’une partie de chasse, mon oncle m’a convoqué pour me dire : "vu ton goût pour les westerns, tu n’auras qu’un dollar troué". Et il me l’a donné ! Je l’ai encore, d’ailleurs. Aujourd’hui, je vis de mon travail, au Maroc et en dehors du Maroc. Mon père a également laissé un patrimoine dont une bonne partie a été spoliée par des courtisans, et même des grosses pointures…


Lesquelles ?

La règle, c’est de ne pas donner les noms des tortionnaires, c’est ça ? (éclat de rires)


Un prince qui s’ouvre à la presse est un prince bavard ou transparent ?

Peut-être les deux. Aujourd’hui, c’est vous qui avez absolument tenu à ce que je vous parle.


Un ministre français avait dit : "un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne". Et un prince ?

Un prince ne fonctionne pas dans le cadre d’une formation gouvernementale.


Vous réclamez le droit de vous exprimer "librement, sans obligation de réserve, sans renoncer à votre rang princier" Vous n’arrivez pas à choisir ?

Je me suis souvent posé cette question. Quand bien même je renoncerais à mon titre, il y aurait toujours quelqu’un pour répliquer : "ah, mais on ne renonce pas à une filiation biologique !". À un moment, j’aurais chanté "Frère Jacques" à la sortie de la prière du vendredi, on aurait parlé d’incitation à la révolution


Vous financez Le Journal ?

Non.


Et Al Ayyam ?

Non plus.


Vous avez pourtant prêté à deux de ses actionnaires le montant de leur participation au capital…

Il m’est souvent arrivé d’aider des entrepreneurs qui voulaient se lancer dans les affaires. Dans ce cas, ces gens m’avaient dit qu’ils lançaient une affaire en Espagne.


Ils vous ont floué ?

Non.


Ils vous ont remboursé, alors ?

En partie, oui.


Vous avez déjà proposé à Mohammed VI de gouverner à ses côtés ?

Jamais. Ni de près ni de loin.


Pourquoi pas ?

Mon éducation ne me permet pas une telle insolence.


"Le Maroc, pays démocratique" est une déclaration qui vous irrite ?

Non, pourquoi est-ce qu’elle m’irriterait ? Ça dépend de ce que vous voulez dire par "démocratique".


Qui permettrait aux Marocains de vivre pleinement leur citoyenneté…

J’aurai une réponse académique : un régime est démocratique quand il a connu une transition et qu’il est en voie de parachever une consolidation. Nous ne sommes pas dans ce cas de figure.


Vit-on normalement quand on vit dans un palais, quand des personnes de l’âge de vos parents se courbent à votre passage et vous embrassent l’épaule 20 fois par jour ?

Non. C’est une déformation terrible de la réalité. S’il n’y a pas de contact avec le monde extérieur pour rattraper cette déformation, on vit dans une bulle. Ça peut même mener à la destruction.


Une monarchie peut-elle encore être "sacrée", au XXIème siècle ?

La démocratie et la sacralité ne sont pas conciliables. Voilà toute la problématique du système politique marocain. C’est une question qui nous touche tous.


Le système serait en péril si un jour, il ne reposait plus sur le sacré ?

Le système, oui. La question est maintenant de dissocier la monarchie du système califal, ou de faire évoluer ce dernier. Réformer la monarchie est le seul moyen de la pérenniser.


Vous avez connu Hicham Mandari ?

Oui, j’ai dû le rencontrer deux ou trois fois dans ma vie.


Il revendiquait une filiation alaouite, et ça ne vous a pas fait réagir. Pourquoi ?

à quel titre aurais-je dû réagir ? Je ne représente que moi-même. Je m’occupe de ma personne.


Par contrainte ou par choix ?

Par choix. Je n’aurais pas été aussi bien dans ma peau, sinon.


Les auditions publiques de l’IER ont commencé cette semaine Vous croyez à une réconciliation par le témoignage ?

Oui, mais je crois que c’est insuffisant. Il faut aller jusqu’au bout de la démarche. Ces auditions ne sont pas une armature assez solide pour un processus de réconciliation complet. C’est très important mais ça ne peut qu’accompagner la transition. Commencer par ça, c’est inédit. Normalement, on commence par une réforme de la chose institutionnelle, par des élections fondatrices, etc. Maintenant, quelques éléments de la société civile ont voulu faire évoluer le système de l’intérieur. D’autres ont peut-être cherché à l’infiltrer, pour le faire entrer dans un engrenage intenable, tout en contradictions. Ce n’est pas pour autant qu’il faut crier au scandale. Sauf que je me demande comment on peut parler de tout cela alors qu’Amnesty et Human Rights Watch viennent de relever des atteintes sérieuses aux droits humains, et que des livres sont encore interdits au Maroc…


Rien n’a donc changé, selon vous ?

La question est de savoir si les dispositions prises après le 16 mai sont le fruit d’un dysfonctionnement de la sécurité face à une menace d’un nouveau genre, ou si on reconduit l’approche sécuritaire classique, cette fois contre une opposition islamiste. La question, pour moi, reste ouverte.


Vous croyez au salut par la société civile ?

Avant, on contrôlait le champ politique par la cooptation de ses acteurs. Aujourd’hui, on coopte la société civile, comme vous dites, pour stériliser le politique. La logique des systèmes a la vie dure.


Vous trouvez normal que Driss Basri soit privé de son passeport ?

Je ne connais pas le détail de l’argumentaire des uns et des autres concernant la question du passeport. Quant à M. Basri, la question qui se pose est : veut-on le juger pour ses actes ? Dans ce cas, il n’y a pas que lui qu’on devrait juger. Si ce n’est pas le cas, il peut jouir de sa liberté, et même se présenter aux élections. Aux Marocains, alors, de choisir.


Quand vous parlez de jugement, vous pensez à votre oncle ?

Je ne trouve pas que la gestion du legs de Hassan II obéit à une démarche claire. La monarchie est un système politique basé sur la continuité. Aujourd’hui, il y a une envie de scinder Hassan II en "bon" et "mauvais". Le "mauvais" qu’on attaque, sans jamais le nommer, pour construire la légitimité du nouveau règne. Et le "bon", qui constitue le socle confortable et imperturbable sur lequel repose la monarchie. Je pense à l’édifice institutionnel et à l’appareil administratif qui permettent au roi de gouverner tranquillement. L’exercice a ses limites.


Jeune Afrique a titré sur vous "l’homme qui voulait être roi". Comment avez-vous pris ça ?

Je me suis bien marré. Les posters dans la rue m’ont impressionné. C’était du Michaël Jackson sans Michaël Jackson.


Pourquoi votre bureau est-il si discret ? Qu’espériez-vous trouver ? Une petite guérite de flics, au moins ?

(Rires) Je m’estime heureux de ne pas avoir été embarqué par ces flics dont vous parlez.


A qui le doit-on si, après la mort de Hassan II, le Maroc n’a connu ni dictature des généraux ni émeutes sociales ?

À la maturité des Marocains, et à l'espoir suscité par le nouveau règne.


Qu’aimeriez-vous qu’on dise de Moulay Hicham quand il ne sera plus de ce monde ?

Qu’il a modestement, à côté d’autres Marocains qu’il a eu l’honneur de côtoyer, œuvré pour une troisième voie, entre la monarchie absolue et l’aventure, quand une fenêtre historique s’est ouverte.


L’Histoire ne retient malheureusement que les essais transformés…

Exact. Machiavel disait : la politique, c’est aussi la fortuna (chance). Et les peuples ne meurent jamais.

© 2004 TelQuel Magazine. Maroc. Tous droits résérvés



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A l’occasion du 40e anniversaire du Prince Moulay Hicham

(4 mars 2004)




Moulay Hicham, Prince Citoyen


Pardon d’être iconoclaste et de vous le dire avec toute mon affection, il y a quarante ans vous êtes né Prince pour devenir citoyen, sans doute le premier citoyen de notre pays. Il y a ceux qui ont confondu succession de trône et changement de régime, néo-makhzen et movida, Perestroïka et Glasnost. Beaucoup, parmi vos admirateurs ou vos détracteurs, vous ont prêté le rôle d’un Deus Ex Machina de la scène politique marocaine. Le sujet marocain souffre toujours du pathos de confier à un homme, une autorité inconditionnelle, en ne sachant pas que c’est la racine même de la tyrannie totalitaire.

Vous avez pris une distance salutaire, le temps de vous « ressourcer » selon votre déclaration, on ne peut que vous donner raison ; en somme vous vous retrempez dans l’intelligence du monde. Votre parcours jusqu’ici, témoigne d’une extraordinaire lucidité. Vos recherches, vos écrits, vos prises de position, pour celles et ceux qui ont en retenu l’essence savent en conscience qu’ils s’inscrivent dans une espérance qui nous est commune : l'émergence d'une société civile où l’individu-citoyen devrait commencer à faire l'apprentissage de l'autonomie responsable vis-à-vis d'un État qui serait alors en relation de réciprocité de droits et de devoirs avec les citoyens dont il devient l'émanation. Vous nous rappelez sans cesse que cette évolution ne s'est produite dans aucun des régimes arabes, et que c’est toujours l'autoritarisme de l'État patrimonial qui prime.

Moulay Hicham, Prince Citoyen, prend date avec l’Histoire, innove, s’expose, il fait un job que la lourde tradition makhzenienne réprouve. Quelle secousse ! Quelle brèche aussi, et pour la colmater quoi d’autre que la bonne vieille logique sécuritaire ! En prenant du champ, vous avez pris de la hauteur, la dérision elle, est restée dans les mêmes cercles. Chacun peut relever que la légitimité politique continue de fonctionner sur des valeurs de groupe englobantes, calamiteuses et mystifiantes; elle exclut le statut de citoyenneté en opérant ou en tentant d'opérer une fusion entre société et appareil d'État, entre le peuple et le Roi.

C’est un bonheur infini pour moi de vous avoir connu, de savoir que vous existez et, comme je vous le dis souvent en plaisantant à moitié, mais à moitié seulement, j’attends le jour où nos compatriotes sentiront en quoi ils vous sont redevables, comment ils doivent vous mériter. Ce don symbolique, est synonyme d’un travail de longue haleine. Un débat, que vous avez eu l’audace et le mérite d’initier. Un débat démocratique continu, libre, ouvert aux grands problèmes internes de notre société aussi bien qu'aux défis permanents de la vie internationale, de l'économie mondiale, de l'ordre - ou désordre politique et militaire, de la philosophie libérale, des stratégies géopolitiques, des mutations idéologiques, de la sécularisation, etc. Les hommes et les femmes capables de nourrir ce débat ne manquent pas, mais il n'y a ni les cadres sociaux qui le transformeraient en un mouvement politique ou intellectuel significatif, ni des espaces institutionnels qui l'amplifieraient tout en garantissant la pertinence. On retrouve la question de l'individu-citoyen qui cherche à émerger, mais qui ne trouve pas de points d'appuis solides ni dans la société, ni dans les diverses sphères de l'expression du pouvoir, ni dans une culture figée ou silencieuse à l’orée de la modernité.

Moulay Hicham, vous avez quarante ans aujourd’hui et moi un espoir, celui d’assister de votre vivant à l’éclosion d’un Maroc nouveau pour lequel vous avez nourri, avec nous, les rêves les plus fous !

Votre ami et compagnon, Ahmed BENANI


Lausanne, le 6 février 2004




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